Alors que le marché de l’immobilier résidentiel ancien montre des signes de reprise depuis l’automne 2024, les dernières données disponibles au 1er avril 2025 laissent présager une dynamique encore fragile. Si certaines villes voient leurs prix repartir à la hausse, d’autres continuent d’enregistrer des baisses significatives, et les délais de vente s’allongent. L’embellie tant espérée pourrait bien n’être qu’un sursaut passager.
D’après les indices des prix immobiliers (IPI) SeLoger – Meilleurs Agents – « Les Echos », le marché immobilier ancien en France poursuit doucement sa stabilisation. En mars 2025, les prix ont progressé en moyenne de 0,1 %, soit une hausse annuelle d’environ 1 %. Ce redressement s’observe surtout dans les grandes métropoles où les prix stagnent, tandis que Paris se démarque avec une hausse de 0,2 % par mois depuis janvier.
En zone rurale, la progression est plus régulière avec une augmentation de 0,5 % en mars, portée par une demande encore soutenue et des prix plus abordables qu’en milieu urbain.
Certaines villes affichent même une croissance nette des prix : à Dijon, Mulhouse, Tours, Antibes, Le Mans, Mérignac, Clermont-Ferrand et Angers, les prix des appartements ont grimpé de 1 % à 1,5 % en un mois. Toulouse, qui a plutôt bien résisté à la crise, enregistre une hausse de 2,2 % depuis le début de l’année.
Malgré ces signaux positifs, la reprise est loin d’être homogène. Plusieurs villes continuent d’enregistrer des baisses de prix notables. À Toulon, Nîmes, Le Havre, Colmar, Besançon, Bourges ou Amiens, les prix des appartements ont chuté de 1,3 % à 1,5 % en mars. À Pau, Aix-en-Provence, Dunkerque, Caen, Metz et Nantes, la baisse tourne autour de 1 %.
Nantes, en particulier, illustre la fragilité du marché : les prix y ont reculé de 6 % sur un an, conséquence d’un déséquilibre croissant entre une offre abondante et une demande en berne.
Autre indicateur révélateur du ralentissement de la reprise : les délais de commercialisation s’allongent. Dans les 11 plus grandes villes françaises, il faut désormais en moyenne 6 jours de plus pour vendre un bien par rapport au début de l’année. Ce phénomène traduit un attentisme croissant des acheteurs, qui pourraient toutefois se décider au printemps, période traditionnellement faste pour le secteur immobilier.
Alexandra Verlhiac, économiste chez SeLoger et Meilleurs Agents, souligne : « Ces évolutions très faibles montrent que la reprise reste timide. Le marché se stabilise avant, peut-être, un redémarrage au printemps. »
Malgré une hausse du volume de transactions — +12 % au premier trimestre selon le réseau Laforêt —, les professionnels de l’immobilier appellent à la prudence. La baisse des prix observée en 2024, combinée à des conditions de financement relativement favorables (taux de crédit à 3,19 % en février contre 4,20 % fin 2023), a stimulé la demande. Mais pour Yann Jéhanno, président de Laforêt, les prix pourraient avoir atteint un point bas, et une remontée trop rapide risquerait de freiner les acheteurs.
Même constat pour Guillaume Martinaud, président du réseau Orpi : « Le redémarrage du marché est extrêmement fragile, pollué par des paramètres que nous ne maîtrisons pas ». Il déplore l’absence d’une politique du logement lisible et stable, ainsi que les incertitudes économiques et géopolitiques, notamment les tensions internationales susceptibles d’affecter certains bassins d’emploi comme l’aéronautique à Toulouse.
Autre facteur d’inquiétude : la possibilité d’une remontée des taux d’intérêt. Après une phase de repli marquée, les taux d’emprunt d’État repartent à la hausse, ce qui pourrait à terme se répercuter sur les crédits immobiliers. Une hausse des taux mettrait à mal le pouvoir d’achat des acquéreurs et freinerait mécaniquement la reprise.
Guillaume Martinaud résume la situation en un mot : « Prudence ». Il invite les vendeurs à ne pas surestimer la reprise : « Il y a des gens qui veulent acheter, mais qui n’ont pas énormément d’argent. Si on augmente les prix, cela retombera comme un soufflet. »
Si les conditions actuelles permettent un certain optimisme, la reprise reste suspendue à de nombreux facteurs d’incertitude : évolution des taux d’intérêt, contexte géopolitique mondial, stabilité fiscale nationale et dynamique de l’emploi.